Dans le cadre d’un changement technologique, le bulletin de paie des salariés passe du format papier au format électronique. Un document papier leur est toutefois transmis par la poste chaque semaine. Pour le syndicat, ce document est un bulletin de paie et il n’est pas transmis dans les délais prévus à la convention collective. Pour l’employeur, le bulletin de paie est distribué par voie électronique alors que le document postal est un « avis de dépôt ». Il faut entre autres décider si le document transmis par la poste au salarié est un bulletin de paie ou un avis de dépôt et si le bulletin de paie est ou n’est pas distribué.
L’arbitre conclut que ce n’est pas un bulletin de paie qui est transmis par la poste aux salariés, mais un avis ou une confirmation de dépôt. En vertu de la convention collective, l’employeur n’est soumis à aucune obligation concernant la transmission d’un avis de dépôt.
Quant à savoir si le bulletin de paie est distribué dans les délais, la preuve révèle qu’il est bel et bien distribué par voie électronique aux salariées en respectant les délais requis. Le principe de la liberté de choix est stipulé à l’article 2 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information (LCCJTI). Il permet à l’employeur d’utiliser un support électronique pour transmettre le bulletin de paie, mais ce choix doit respecter les règles de droit. L’article 46 de Loi sur les normes du travail (LNT) stipule que « l’employeur doit remettre au salarié, en même temps que son salaire, un bulletin de paie […]. » La convention collective exige que le document soit « distribué », ce qui dans le contexte, est synonyme de « remettre ». En vertu de l’article 31 al.2 de la LCCJTI, un tel document est présumé remis, lorsque le destinataire y consent. Cependant, lorsque le destinataire refuse, la présomption ne s’applique pas. Ainsi, le bulletin de paie est uniquement « accessible », ce qui ne rencontre pas les exigences de la LNT et de la convention collective. L’arbitre est d’avis que le consentement à la transmission d’un document électronique exigé par l’article 31 doit être vu, en l’espèce, sous l’angle des rapports collectifs de travail. Ainsi, le consentement en question peut s’analyser à l’égard des comportements tacites du syndicat et ceux des salariés.
La preuve révèle que personne ne manifeste son refus lors des rencontres de salariés. Par la suite, certains employés demandent même de ne plus recevoir l’avis de dépôt et les nouveaux employés ne les reçoivent pas. La prépondérance de la preuve penche en faveur de l’existence d’un consentement à la transmission électronique du bulletin de paie. En raison de la présomption de l’article 31 de la LCCJTI et de la preuve soumise au Tribunal, le bulletin de paie est remis aux salariés conformément aux exigences de la LNT et de la convention collective.