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Le moment de la réception d’un document technologique

9 Sep 2021 4:50 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

Le requérant (M. Charbonneau) conteste une décision d’un agent de réexamen du Bureau de réexamen des sanctions administratives pécuniaires (Bureau) confirmant la décision du Ministre lui imposant une sanction administrative pécuniaire au montant de 1 000 $. Il lui est reproché d’avoir réalisé des travaux en milieu humide sans autorisation préalable. La décision de l’agent de réexamen a été transmise à M. Charbonneau le 28 septembre 2020, par messagerie électronique à l’adresse courriel indiquée au formulaire qu’il a complété. Prétendant n’avoir pas reçu de document du Bureau, la décision lui a alors été transmise par envoi postal le 16 décembre 2020. Le recours auprès du Tribunal est déposé le 13 janvier 2021.

Le Ministre soulève d’abord l’irrecevabilité du recours, parce qu’il n’aurait pas été intenté dans les délais prescrits, soit dans les 30 jours qui suivent la notification de la décision contestée.  Le Tribunal doit donc décider si M. Charbonneau a pris connaissance de la décision en recevant le courriel (alors le délai prescrit n’est pas respecté) ou au contraire, lors de l’envoi postal.

Le Tribunal rappelle d’abord qu’il heurte l’équité et les principes de justice fondamentale qu’une personne puisse perdre son droit d’intenter un recours sans qu’une preuve de la plus grande fiabilité soit présentée de la cause de rejet.

La Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information établit les règles applicables aux communications effectuées au moyen de documents technologiques, dont le courriel. Le procureur du Ministre reconnaît d’ailleurs que cette législation peut s’appliquer à la notification de ses décisions. L’article 28 de la Loi permet au Ministre de notifier ses décisions par courriel. Cette prémisse se justifie d’autant plus lorsque l’Administration prend soin, comme ici, d’informer l’administré qui lui présente une demande qu’il privilégie la communication par messagerie électronique.

Bien que le courriel soit un mode de transmission valide, encore faut-il déterminer à quel moment M. Charbonneau l’a reçu, sans quoi il n’a pu prendre connaissance de la décision et n’a pas été valablement notifié. L’article 31de la Loi crée une présomption du moment de la réception d’un courriel.

Cette présomption s’applique si les gestes nécessaires pour envoyer le document ont été accomplis. Le courriel mis en preuve sous support papier ainsi que la lettre de transmission qui y est jointe ne laissent aucun doute sur le lancement du parcours électronique par le Bureau. Dans un second temps, le document est accessible seulement s’il est transmis à l’adresse courriel que le destinataire a identifiée pour le recevoir. Or, M. Charbonneau a indiqué, sur le formulaire de demande de réexamen, à quelle adresse courriel le Ministre peut lui transmettre toutes ses communications. Aussi, l’adresse fournie par le destinataire doit être active au moment de l’envoi. Le Tribunal ignore si M. Charbonneau a fermé ce compte de messagerie après l’avoir utilisé dans ses échanges avec l’agente de réexamen le 22 juillet 2020. Le cas échéant, il aurait dû en informer le Bureau. En l’absence d’une preuve contraire de M. Charbonneau, le Tribunal s’en tient néanmoins à l’état normal des choses et présume que l’adresse active le 22 juillet 2020 l’était toujours le 28 septembre suivant.

La dernière condition fixée par l’article 31 permet d’établir le moment de la réception du courriel par un bordereau d’envoi. De plus, l’article 7 précise que l’intégrité du document transmis se présume, à moins d’une preuve prépondérante contraire. L’intégrité de la décision jointe au courriel est donc présumée sans que l’information pour la vérifier apparaisse nécessairement au bordereau d’envoi. Il appartient au destinataire de contester l’intégrité du document joint en faisant une preuve contraire. Quoi qu’il en soit, le support papier représentant le courriel de transmission de la décision contestée indique à la fois le nom du fichier correspondant à la décision et le volume des deux pièces jointes, ce qui répond à la dernière condition de l’article 31. Enfin, les autres composantes du bordereau d’envoi sont aussi présentes dans ce courriel. Il s’agit donc, suivant l’article 31, d’un bordereau d’envoi qui établit que le moment de la réception de la décision contestée est le 28 septembre 2020 à 11:02. Toutes les conditions d’application de la présomption établissant le moment de la réception d’un courriel étant satisfaites, et celle-ci n’ayant pas été repoussée par une preuve contraire, le Tribunal retient que la décision contestée a été notifiée à M. Charbonneau le 28 septembre 2020.  Lorsque M. Charbonneau intente son recours le 13 janvier 2021, le délai pour ce faire est expiré. Le recours doit donc être rejeté.

  

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