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NOUVELLES
En août 2019, la période de maraudage dans les secteurs public et parapublic est ouverte. Le Syndicat de soutien du Pays-des-Bleuets (le Syndicat FISA) représente les employés de soutien de la Commission scolaire du Pays-des-Bleuets. Or, deux autres associations cherchent à représenter ce groupe de salariés : le Syndicat du personnel de soutien scolaire du Pays-des-Bleuets (SPSPB) (le Syndicat CSQ) et le Syndicat du soutien scolaire du Pays-des-Bleuets (le Syndicat CSN). La requête en accréditation du Syndicat CSN a été décidée recevable. La question soumise cette fois concerne la validité de certaines démissions notifiées par le Syndicat CSQ aux deux autres associations, ne portant pas la signature manuscrite des démissionnaires. Le Syndicat CSQ explique la situation par l’utilisation de moyens informatiques mis à la disposition des salariés et leur permettant d’apposer une signature électronique plutôt que manuscrite.
La juge rappelle que la signature consiste en une marque distinctive ou une combinaison d’informations permettant l’identification des « signataires ». Il peut s’agir d’une adresse courriel et d’une signature électronique, d’un nom et d’un numéro matricule ou d’un numéro d’unité ou d’un numéro d’identification personnelle (NIP). Dans tous ces cas, les informations permettent de faire un lien entre le contenu du document et la personne. En l’espèce, les démissions notifiées ne comportent que le nom dactylographié du démissionnaire sur un document faisant état qu’il démissionne d’une centrale syndicale (et non d’une association) à laquelle il n’appartient pas nécessairement. Une inscription filigrane très pâle indique que le document a été signé électroniquement. Aucune marque personnelle n’y apparaît. À la différence d’une adhésion électronique qui permet à l’association à laquelle adhère une personne de faire des liens permettant d’identifier cette personne (nom, adresse courriel, signature électronique, etc.) et de les démontrer au Tribunal chargé de vérifier le caractère représentatif, les démissions sont assujetties à une exigence supplémentaire d’aviser l’association de laquelle on démissionne. Une notification du document signé est exigée. L’association peut ainsi vérifier l’identité du démissionnaire et faire des démarches auprès de lui pour le récupérer à titre de membre.
Dans la présente affaire, l’association à laquelle la démission est notifiée n’a aucune indication sérieuse que la personne mentionnée sur le document a véritablement exprimé son intention de démissionner. Une liste de noms dactylographiés lui donnerait la même information, ni plus ni moins. Dans ces circonstances, comment pourrait-elle, distinguer une démarche sérieuse d’un leurre visant par exemple à déstabiliser une association et monopoliser ses énergies à des activités de récupération de membres qu’elle croirait démissionnaires. La loi applicable concerne la signature et une signature doit, suivant le Code civil du Québec, comporter une marque personnelle. Ce n’est pas le cas ici. En l’absence d’une telle marque personnelle, la notification exigée par le Code du travail ne peut constituer l’expression d’une volonté claire de révoquer une adhésion.
Il s’agit d’une demande en injonction provisoire. Les demanderesses ont présenté une preuve convaincante que la défenderesse Ho a orchestré une campagne de désinformation sur la page Google des demanderesses en y inscrivant des évaluations négatives quant à la pratique professionnelle de la demanderesse Dam (une acupuncteure) par des personnes qui n'ont pas été traitées par cette dernière.
Le Tribunal est d'avis que Google LLC a le devoir de réagir et de corriger la situation lorsque, comme en l'espèce, des preuves sérieuses de manipulation malhonnête du site d'un membre lui occasionnant des préjudices sérieux lui sont présentées. À défaut d'ordonnance s'adressant à Google LLC, des commentaires de personnes inconnues, qui n'existent peut-être pas, pourront demeurer sur la page Google des demanderesses sans que Google LLC soit obligée d'intervenir, ce qui serait de nature à rendre le jugement inefficace. Les demanderesses ont fait la démonstration d'une apparence de droit sérieuse quant aux trois défendeurs et quant à la mise en cause Google LLC. De même, un préjudice irréparable a été démontré du fait que les défendeurs et d'autres personnes inconnues ont déjà modifié leur profil, jusqu'alors positif, sur leur page Google, alors qu’une partie importante des futurs clients prennent en compte ces indications sur Internet. Le Tribunal ordonne donc aux défendeurs ou à toute personne ayant connaissance de l’ordonnance de s'abstenir de diffuser, publier, reproduire ou faire circuler des propos diffamatoires relativement à la qualité des services professionnels des demanderesses, en tout ou en partie, sur le moteur de recherche Google ou toute autre plateforme de communication sur Internet. Il ordonne aussi à Google LLC de retirer du site Google ou de toute autre plateforme sous son contrôle les avis publiés relativement à la qualité des services professionnels de la demanderesse.
Après 3 ans d’une enquête appelée Bronze et de nombreuses perquisitions, l’Autorité des marchés financiers (AMF) avise officiellement le Tribunal qu’aucune poursuite pénale ou administrative ne sera intentée en suite de cette enquête. Mais elle prétend avoir le droit de conserver les copies de quelque 16 000 000 documents technologiques saisis durant l’enquête.
Or, lorsque l’État saisit par mandat de perquisition des biens aux fins d’une enquête, il ne peut les retenir indéfiniment. Tant que des accusations ne sont pas déposées, la rétention est soumise de façon périodique à l’autorisation du tribunal. Lorsque le saisissant n’entame aucune poursuite, le Code de procédure pénale (le CPP) prévoit à son article 134 que les choses saisies doivent être remises au saisi. Peut-il cependant conserver une copie des documents saisis? Le Tribunal répond à cette question par la négative.
L’AMF invoque, entre autres arguments, que les paragraphes (13) et (14) de l’article 490 du Code Criminel permet, avant de remettre un document original à son détenteur légitime, d’en faire une copie certifiée conforme qui sera admissible en preuve et aura la même force probante que l’original. Bien que le CPP n’ait pas de disposition semblable, l’AMF soutient que l’article 61 du CPP permet de s’inspirer de la jurisprudence portant sur ces dispositions du Code criminel pour conclure à un droit de conserver indéfiniment des copies des documents après avoir remis les supports saisis.
Le Tribunal juge que cet argument fait fi du contexte particulier de la perquisition informatique qui constitue une saisie des plus envahissantes, d’une grande ampleur et des plus attentatoires à la vie privée. En l’espèce, l’État conserve des copies de plus de 16 000 000 documents, dont 14 millions de ceux-ci sont hors la portée des mandats émis, ce qui signifie que l’AMF ne peut légalement en avoir possession. De plus, des milliers, sinon des millions de documents mettent également en jeu l’attente raisonnable à la vie privée de tiers. Dans le cadre d’une perquisition informatique, la fouille des supports électroniques saisis passe nécessairement par la confection d’une copie miroir de l’intégralité de leur contenu. Cela signifie qu’uniquement pour des raisons technologiques, l’État saisit sciemment des millions de documents auxquels il n’a pas droit. Cette réalité technologique doit impérativement être accompagnée d’une extrême vigilance dans la protection des droits attachés à ces documents, tant ceux des saisis que ceux de tiers innocents. L’enquête de l’AMF est terminée, elle n’aura aucune suite de nature pénale ou administrative. Le Tribunal rejette également les autres arguments de l’AMF à l’appui de sa prétention que malgré la fin de l’enquête et l’absence de toute procédure en découlant, elle peut indéfiniment et sans contrôle judiciaire conserver une copie de tous les documents saisis.
Dans un procès pour excès de vitesse, la poursuite a déposé en preuve le constat, le rapport d’infraction abrégé et fait témoigner le policier qui explique le déroulement de l’intervention ainsi que les étapes suivies relativement à l’utilisation de l’appareil laser. Durant son témoignage, le policier réfère au rapport d’infraction abrégé, qu’il a imprimé à titre d’aide-mémoire, afin d’expliquer certains détails précis. Il ressort du témoignage du policier que le rapport produit par la poursuite et celui qu’il a imprimé lui-même comportent des distinctions. L’agent suggère qu’il s’agit probablement de problèmes causés lors de l’impression des documents. Le défendeur témoigne qu’il ne roulait pas à la vitesse reprochée, que les différences entre les deux rapports abrégés affectent leur valeur probante et qu’il devrait, par conséquent, être acquitté. La poursuite plaide que les différences entre les rapports constituent des erreurs matérielles qui n’affectent pas la valeur probante de la preuve de la poursuite qui démontre, hors de tout doute raisonnable, la commission de l’infraction.
Le rapport d’infraction abrégé démontre tous les éléments essentiels de l’infraction créant ainsi une preuve prima facie de la fiabilité des résultats. Par contre, le rapport d’infraction abrégé ne contient pas les mêmes éléments. Le Tribunal ne croit pas qu’il s’agisse d’un problème survenu lors de l’impression des documents. L’analyse et la comparaison des deux rapports démontrent des divergences concernant plusieurs détails précis dans la section « M », qui, selon toute vraisemblance, ont été modifiés et non effacés par une imprimante. Il n’est pas plausible que l’imprimante supprime aléatoirement deux lignes complètes en milieu de page ainsi que les six dernières lignes de la section « M » du rapport, mais sans effacer la dernière section « attestation ». De même, il n’est pas crédible que l’imprimante omette certains mots situés au milieu d’une ligne, alors que le texte qui suit n’est pas effacé. De plus, il est invraisemblable, et même inquiétant que l’imprimante efface la décimale aux tests de télémétrie, mais conserve l’unité de mesure (m).
Finalement, il est très particulier que l’imprimante enlève des bouts de phrases et convertisse une lettre minuscule en majuscule pour la rendre grammaticalement conforme au nouveau texte. Toutes ces anomalies amènent le Tribunal à croire qu’un des deux rapports a été modifié, ou bien, il existe deux rapports d’infraction abrégés différents pour le même constat. Ces divergences inexpliquées affectent la valeur probante de la preuve de la poursuite et le Tribunal ne lui accorde aucune fiabilité. Le Tribunal n’est pas convaincu, hors de tout doute raisonnable, de la commission de l’infraction.
La demanderesse a communiqué les termes d’une entente à son fils par message texte. Les défenderesses s’opposent à l’admissibilité de ce document sur support technologique. Mais comme elles renoncent à prouver qu’il y a atteinte à son intégrité, la demanderesse bénéficie de la présomption d’intégrité prévue à l’article 7 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information et n’a pas à prouver sa fiabilité. Le document technologique est admissible.
La locataire réclame des dommages-intérêts au locateur concernant un bail du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014. Elle allègue que le logement ne lui a pas été délivré en bon état d’habitabilité ni en bon état de propreté et qu’il était non sécuritaire le 1er juillet 2013. Elle a refusé le logement le 1er juillet 2013 mais avait préalablement versé à l’avance au locateur le loyer complet de ce mois, soit 600 $.
Le Tribunal constate que dès le 2 juillet 2013, les parties ont échangé des messages texte dans lesquels le locateur offre clairement de rembourser la locataire si celle-ci ne veut plus du logement. La locataire répond qu’elle accepte l’annulation du bail et le remboursement du loyer déjà versé. Le Tribunal retient que le locateur fait son offre à 9 h 53 et la locataire l’accepte à 12 h 42, trois heures plus tard. Elle informe ce dernier de son acceptation par message texte. Le locateur ne retire pas son offre en temps utile, avant son acceptation. Il y a donc échange de consentements. Il n’y a aucune preuve de vice de consentement (erreur, dol ou crainte) de part et d’autre. Le bail est annulé par les parties et le locateur doit rembourser à la locataire les sommes versées à titre de loyer. Les parties consentent à se remettre dans l’état où elles étaient avant la signature du bail.
Le Tribunal constate l’entente des parties le 2 juillet 2013, l’annulation du bail, le fait que le locateur s’engage à rembourser le loyer déjà versé (600 $) à la locataire, mais qu’il négligera ou refusera par la suite de donner suite à son offre, pourtant acceptée, en temps utile par la locataire. Le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu de revenir sur une entente librement consentie et qu’il y a lieu à la restitution du premier loyer versé par la locataire au locateur.
Dans le contexte d’une procédure de divulgation de la preuve sur support informatique lors d’un procès pour des infractions à la législation sur l’administration fiscale, le Tribunal déclare qu’une communication de la preuve d’envergure commande une divulgation électronique indexée d’une manière organisée et la présence d’un outil de recherche qui permet (1) d’effectuer une recherche unique couvrant tous les éléments contenus dans la banque de données divulguée (2) d’effectuer les recherches par mot-clé ou par champ de recherche et (3) de préserver des liens entre fichiers et documents parents.
Dans le contexte actuel de la communication de la preuve au défendeur, l’absence de logiciel, moteur de recherche ou système de gestion d’une divulgation électronique substantielle ne satisfait pas le test de l’accessibilité raisonnable. Bien que le défendeur ne peut prétendre au droit de bénéficier des meilleurs systèmes de gestion ou outils de recherche, force est de constater que les éléments, renseignements et informations transmis à ce dernier sont organisés de manière inefficace et inadéquate. Comme le souligne le juge Guy Cournoyer, « la divulgation électronique est utile si l’information est raisonnablement accessible ».
Le défendeur a établi, selon la balance des probabilités, que la divulgation de la preuve sur support informatique comporte des lacunes spécifiques ou des difficultés techniques significatives. Cela dit, elle compromet sa capacité de présenter une défense pleine et entière et va à l’encontre des préoccupations de la Cour suprême qui énonce que tous les dossiers en matière criminelle et réglementaire doivent procéder avec diligence et célérité afin que l’image de la justice ne soit déconsidérée. À l’aube de l’année 2020, il est important que les représentants de l’État, investis des pouvoirs de poursuivre des citoyens, disposent de moyens et fournissent les outils nécessaires associés au volume de la preuve à communiquer sur support électronique. Agir autrement rend la tâche difficile et fastidieuse pour la défense et risque de compromettre que les procès s’instruisent dans des délais raisonnables.
Dans une affaire où les locataires, entre autres, se disent victimes de harcèlement de la part du locateur, le Tribunal doit déterminer si un enregistrement des propos tenus lors d’une rencontre est recevable. La preuve révèle que l’enregistrement a été fait à l’insu des interlocuteurs. Une des locataires explique le contexte de l’enregistrement de la rencontre à partir de son téléphone cellulaire. Elle précise que l’autre locataire a transféré le contenu de l’enregistrement sur une clef USB, laquelle est déposée en objet de preuve. Elle affirme avoir enregistré les discussions admettant avoir manqué le début de la conversation. Le locateur s’oppose au dépôt de l’enregistrement, lequel serait incomplet, car il manquerait le début de la conversation.
Le Tribunal rappelle que si les conditions générales d’admissibilité prévues à la loi sont respectées et si le contenu des enregistrements est pertinent à la solution du litige, l’enregistrement sera admissible. Il appartient à la partie voulant déposer l’enregistrement de démontrer l’identité des locuteurs, son authenticité et son intégralité. La preuve doit être inaltérée et fiable. Les propos doivent être suffisamment audibles et intelligibles. En l’instance, le Tribunal est d’avis que le support ou la technologie du document que veulent mettre en preuve les locataires est recevable. De plus, les propos sont audibles, l’identité des interlocuteurs démontrée, l’enregistrement inaltéré et intégral, même s’il manque le début de la rencontre. À ce sujet, le locateur, présent lors de cette conversation, ne soutient pas que l’enregistrement a été altéré ni qu’en l’absence du début, les échanges auraient pu être compris autrement. L’écoute de l’enregistrement est pertinente, car elle permet de comprendre le sentiment d’insécurité des locataires en présence d’un interlocuteur hostile pour ensuite déterminer s'il peut s'agir de harcèlement au sens de la Loi.
Les auteurs rappellent que la loi québécoise sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé doit être modernisée. Depuis son adoption, il y a un quart de siècle, plusieurs changements se sont produits. Ils concluent que la loi doit être modifiée aussi bien quant à son champ d’application que du modèle de consentement sur lequel elle est actuellement fondée. Elle doit aussi inclure des règles de transparence, préciser les droits des individus et être ouverte aux technologies de l’information de même qu’aux nouveaux modèles d’affaires.
L’auteur expose ses réflexions fondées en grande partie sur les résultats de recherches menées par Option consommateurs sur l’Internet des objets. On y expose que si l’Internet des objets comporte d’intéressantes innovations, elle soulève des questions préoccupantes à l’égard de la protection de la vie privée.
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