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Au stade des mesures provisoires, l’une des questions en litige est la garde de l’enfant. Les témoignages entendus du père et de la mère sont diamétralement opposés. Madame décrit Monsieur comme étant généralement absent de la vie familiale et ayant une quinzaine de maîtresses. Monsieur se décrit, au contraire, comme un père présent et impliqué dans toutes les sphères de la vie de sa fille. Il réfute avec force les allégations de Madame selon lesquelles il aurait plusieurs maîtresses. Mais en contre-interrogatoire, Monsieur est confronté à des « conversations Facebook » qu’il a eues avec plusieurs femmes et est forcé d’admettre que les relations qu’il entretient avec elles ne sont pas que platoniques. Son avocate demande le retrait du dossier de la Cour de ses « conversations Facebook » en invoquant l’article 2858 du Code civil du Québec. Son droit à la vie privée serait bafoué. Et conserver au dossier les conversations en question déconsidérerait l’administration de la justice. En contre-preuve, Madame témoigne avoir pris connaissance des conversations Facebook de Monsieur en utilisant, avec sa permission, le téléphone cellulaire de Monsieur ou après que Monsieur se soit servi du téléphone intelligent de Madame pour accéder à son compte Facebook. Or, Monsieur n’a pas, par la suite, déconnecté son compte Facebook de sorte que Madame a pu y accéder, à même son propre téléphone, comme s’il s’agissait de son compte à elle.
L’article 2858 du Code civil du Québec impose un test en deux étapes. D’abord, il faut examiner si l’élément de preuve attaqué a été obtenu dans des conditions qui portent atteinte aux droits et libertés fondamentaux. Ensuite, on doit déterminer si son utilisation est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice.
En fonction de la preuve entendue, le Tribunal conclut que l’accès par Madame au téléphone de Monsieur et à son compte Facebook constitue tout au plus une mince atteinte à son droit à la vie privée si véritablement atteinte il y a. De plus, le Tribunal estime que le maintien au dossier des conversations Facebook ne déconsidère pas l’administration de la justice, la recherche de la vérité devant l’emporter, dans ce cas-ci, sur une atteinte si minime au droit à la vie privée de Monsieur. Certes, ses conversations Facebook avec ses interlocutrices ne jettent pas un doute sur ses capacités parentales en soi mais permettent cependant au Tribunal d’évaluer correctement sa crédibilité compte tenu qu’il a affirmé, lors de son interrogatoire en chef, n’entretenir aucune relation extraconjugale. Autrement dit, ce n’est pas le contenu de ses conversations Facebook qui est pertinent en tant que tel, mais plutôt le fait qu’elles démontrent que Monsieur n’a pas dit la vérité alors qu’il témoignait sous serment.
Pour toutes ces raisons, le Tribunal préfère, pour les fins qui le concernent au stade des mesures provisoires, la version de Madame à celle de Monsieur sur tous les éléments de leurs témoignages respectifs qui sont pertinents à la garde.
La demanderesse réclame la somme de 15 000 $ de Vidéotron parce que tous les messages téléphoniques contenus dans sa boîte vocale ont été effacés lors d’un transfert de ligne téléphonique. Elle conservait quelques messages de sa mère décédée qu’elle écoutait régulièrement et plusieurs messages d’affaires. Dans sa contestation, Vidéotron soutient avoir été avisée de la perte de la boîte vocale plus d’une semaine après le transfert et qu’elle a été incapable de retrouver les messages. Vidéotron soulève également l’application d’une clause de limitation de responsabilité. Un jugement a eu lieu par défaut et un pourvoi en rétractation a été accueilli.
Le Tribunal considère que Vidéotron a commis une faute en ne fournissant pas à la demanderesse les informations essentielles pour lui permettre d’assurer la sauvegarde de ses données. Quant à la clause de limitation de responsabilité invoquée par Vidéotron, il a déjà été décidé qu’une telle clause contrevenait à l’article 10 de la Loi sur la protection du consommateur et elle est en conséquence inopposable à la demanderesse. Celle-ci a fait la preuve des dommages moraux qui lui avaient été causés par la perte des messages de sa mère. Il y a lieu de l’indemniser pour cette perte ainsi que, de façon générale, pour tous les troubles, ennuis et inconvénients qui lui ont été causés par la perte des messages personnels et professionnels. Quant à la preuve de la perte de revenus, elle demeure largement imprécise. Une somme de 5 000 $ apparaît appropriée vu la preuve faite par les parties.
Dans le contexte d’un litige sur l’interprétation d’une situation contractuelle, le Tribunal doit statuer sur des objections à la production de certains documents. Le premier document est une reproduction maison de deux courriels transmis par la demanderesse au défendeur les 25 et 27 mai 2016 (Pièce D-2). Les autres documents sont les échanges complets entre la demanderesse et le défendeur desquels ont été sortis ces deux courriels (Pièces D-3A et D-3B).
Cette objection perd sa pertinence puisque le défendeur a produit, sans objection, les photographies, datées de la veille, de l’écran d’ordinateur affichant les courriels échangés avec la demanderesse à ces dates accompagnés de la photographie du contenu de la boite de réception de la messagerie Gmail. Puisque le défendeur ne souhaite plus produire les documents sous objection, le Tribunal n’a, en principe, pas à en décider. Mais le Tribunal croit utile de préciser le sort qui aurait été réservé à ces documents successivement produits.
Toutes ces pièces concernent des éléments matériels de preuve visant à permettre de constater un fait documenté. Ces éléments matériels prennent la forme soit de documents technologiques (les courriels sous les pièces D-2, D-3A et D-3-B) ou de photographies (captation photo de l’écran d’ordinateur affichant les courriels échangés). La présentation d’un tel élément matériel de preuve, pour avoir force probante, doit être accompagnée d’une preuve préalable distincte qui en établit l’authenticité. Dans le cas d’un document technologique, il y a dispense de faire une telle preuve distincte d’authenticité lorsque le support ou la technologie employée permet d’affirmer que l’intégrité du document est assurée, notamment en présence des métadonnées.
Pour ce qui est des photographies, leur authenticité est établie par le témoignage du défendeur quant au fait qu’il a lui-même photographié l’écran de son ordinateur la veille pour confirmer le contenu de sa messagerie Gmail de façon à appuyer l’existence des courriels échangés en mai 2016 entre les parties. La date est confirmée au bas de l’écran de l’ordinateur. En l’absence de motif de reproche, cette preuve est suffisante. L’objection aurait été rejetée.
Pour ce qui est de la reproduction maison des deux courriels transmis par la demanderesse les 25 et 27 mai 2016 (Pièce D-2), une telle atteinte à l’intégrité du document est établie. La facture du document montre que ces courriels ont été manipulés et mis en page pour répondre sans doute à des impératifs de présentation. Ce document n’est pas intègre puisque l’information est altérée et ne peut servir à établir les faits qu’il a pour objet de constater, soit le contenu de courriels originant de la demanderesse. L’objection aurait en conséquence été accueillie.
Pour ce qui est des échanges complets entre la demanderesse et le défendeur (Pièces D-3A et D-3B), les courriels reproduits sur support papier ne souffrent pas des mêmes lacunes. L’impression contient les informations traditionnellement présentes dans les courriels, soit l’expéditeur, le récipiendaire, la date et l’heure de l’envoi de même que l’objet. La fiabilité technologique du support n’est pas mise en doute par la demanderesse. De plus, la conformité est ici confirmée par les photographies de l’écran d’ordinateur affichant les courriels échangés. À l’instar des photographies, l’objection à la production de ces pièces aurait été rejetée.
Selon la Directive sur le commerce électronique, un hébergeur tel que Facebook n’est pas responsable des informations stockées lorsqu’il n’a pas connaissance de leur caractère illicite ou lorsqu’il agit promptement pour les retirer ou en rendre l’accès impossible dès qu’il en prend connaissance. Cette exonération n’empêche toutefois pas que l’hébergeur se voie enjoindre de mettre un terme à une violation ou qu’il prévienne une violation, notamment en supprimant les informations illicites ou en rendant l’accès à ces dernières impossible. En revanche, la Directive interdit d’imposer à un hébergeur de surveiller, de manière générale, les informations qu’il stocke ou de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant des activités illicites.
Dans son arrêt rendu le 3 octobre 2019, la Cour de justice de l’Union européenne explique que la Directive sur le commerce électronique, qui vise à instaurer un équilibre entre les différents intérêts en jeu, ne s’oppose pas à ce qu’une juridiction d’un État membre puisse enjoindre à un hébergeur de supprimer les informations qu’il stocke et dont le contenu est identique à celui d’une information déclarée illicite précédemment ou de bloquer l’accès à celles-ci, quel que soit l’auteur de la demande de stockage de ces informations.
La Directive ne s’oppose pas à ce qu’une juridiction d’un État membre puisse enjoindre l’hébergeur de supprimer les informations visées par l’injonction ou de bloquer l’accès à celles-ci au niveau mondial, dans le cadre du droit international pertinent.
Dans un arrêt rendu le 24 septembre 2019, la Cour de justice de l’Union européenne apporte d’importantes précisions sur les conditions dans lesquelles les personnes peuvent obtenir le déréférencement d’un lien apparaissant dans un résultat de recherche lorsque la page auquel le lien renvoie contient des informations relatives à des informations sensibles.
La Cour part de la prémisse que l’exploitant d’un moteur de recherche est responsable non pas du fait que des données à caractère personnel figurent sur une page web publiée par un tiers, mais du référencement de cette page et, tout particulièrement, de l’affichage du lien vers celle-ci dans la liste des résultats présentée aux internautes à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne physique. Un tel affichage du lien en question dans une telle liste est susceptible d’affecter significativement les droits fondamentaux de la personne concernée au respect de sa vie privée et à la protection des données à caractère personnel la concernant.
Aussi, dans la mesure où l’activité d’un moteur de recherche est susceptible d’affecter significativement les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel, l’exploitant de ce moteur en tant que personne déterminant les finalités et les moyens de cette activité doit assurer, dans le cadre de ses responsabilités, de ses compétences et de ses possibilités, que celle-ci satisfait aux exigences du droit de l’Union pour que les garanties prévues par celui-ci puissent développer leur plein effet et qu’une protection efficace et complète des personnes concernées, notamment de leur droit au respect de leur vie privée, puisse effectivement être réalisée.
La Cour retient que, lorsque l’exploitant d’un moteur de recherche est saisi d’une demande de déréférencement portant sur un lien vers une page Internet sur laquelle des données sensibles sont publiées, il doit, compte tenu de la gravité de l’ingérence dans les droits fondamentaux de la personne concernée au respect de la vie privée, vérifier si l’inclusion de ce lien dans la liste de résultats, qui est affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom de cette personne, s’avère strictement nécessaire pour protéger la liberté d’information des internautes potentiellement intéressés à avoir accès à cette page Internet au moyen d’une telle recherche.
La Cour de justice de l’Union européenne avait à répondre à des questions préjudicielles visant à savoir si les règles du droit de l’Union relatives à la protection des données à caractère personnel obligent un moteur de recherche à opérer un déréférencement sur l’ensemble des versions de son moteur ou sur la seule version correspondant à l’État membre de résidence du bénéficiaire du déréférencement.
La Cour répond qu’il n’existe pas, pour l’exploitant d’un moteur de recherche qui fait droit à une demande de déréférencement formulée par la personne concernée, d’obligation découlant du droit de l’Union de procéder à un tel déréférencement sur l’ensemble des versions de son moteur. Le droit de l’Union oblige, toutefois, l’exploitant d’un moteur de recherche à opérer un tel déréférencement sur les versions de son moteur correspondant à l’ensemble des États membres et de prendre des mesures suffisamment efficaces pour assurer une protection effective des droits fondamentaux de la personne concernée. Ainsi, un tel déréférencement doit, si nécessaire, être accompagné de mesures qui permettent effectivement d’empêcher ou, à tout le moins, de sérieusement décourager les internautes effectuant une recherche sur la base du nom de la personne concernée à partir de l’un des États membres d’avoir, par la liste de résultats affichée à la suite de cette recherche, accès, via une version de ce moteur « hors UE », aux liens qui font l’objet de la demande de déréférencement. La juridiction nationale devra vérifier que les mesures mises en place par Google Inc. satisfont à ces exigences.
Mais la Cour constate que, si le droit de l’Union européenne n’impose pas, en l’état actuel, un déréférencement mondial, il ne l’interdit pas non plus. Ainsi, une autorité de contrôle est compétente pour obliger un moteur de recherche à déréférencer les résultats sur toutes les versions de son moteur si cela est justifié, dans certains cas, pour garantir les droits de la personne concernée.
Le défendeur est accusé d’avoir, à titre de conducteur d’un véhicule routier, fait usage d’un téléphone cellulaire. Le conducteur regardait l’écran du téléphone portable que la passagère du véhicule tenait pour lui, afin de lui permettre de consulter la fonction GPS. Le Tribunal doit déterminer si la main de la passagère, qui tient l’écran de son téléphone portable pour que le conducteur puisse consulter la fonction GPS, est assimilable au « support » prévu par la loi.
Le défendeur admet qu’il était en conversation téléphonique en utilisant un dispositif mains libres au moment où il a consulté l’écran GPS tenu par la passagère. Bien qu’il s’agisse clairement d’une distraction au volant, le fait de consulter un GPS durant une conversation téléphonique n’est pas contraire à la loi.
Pour que l’utilisation d’un appareil GPS soit permise par la loi, il faut que chacune des quatre conditions mentionnées au deuxième paragraphe de l’art. 443.1 du Code de la sécurité routière (C.s.r.) soient satisfaites. L’écran de l’appareil doit afficher uniquement des informations pertinentes pour la conduite du véhicule ou liées au fonctionnement de ses équipements usuels; il doit être intégré au véhicule ou installé sur un support, amovible ou non, fixé sur le véhicule; il doit être placé de façon à ne pas obstruer la vue du conducteur du véhicule routier, nuire à ses manœuvres, empêcher le fonctionnement d’un équipement ou en réduire l’efficacité et de manière à ne pas constituer un risque de lésion en cas d’accident et enfin, l’écran doit être positionné et conçu de façon à ce que le conducteur du véhicule routier puisse le faire fonctionner et le consulter aisément.
Les conditions concernant l’information pour la conduite, la sécurité et la facilité d’utilisation ne posent pas de problème puisque c’est la passagère qui fait fonctionner l’appareil en utilisant uniquement la fonction GPS. Il faut plutôt s’attarder aux conditions concernant le support. Le Tribunal estime que rien n’interdit que le support en question puisse être la main tendue de la passagère du véhicule. Mais le support doit être « intégré ou fixé au véhicule », pour que la manœuvre dans son ensemble soit considérée comme étant permise par la loi. On ne peut assimiler la main de la passagère à un support fixé sur le véhicule.
Le Tribunal doit se pencher sur l’application possible de la défense de minimis non curat lex. L’analyse de la preuve révèle qu’il s’agit d’une violation plus technique que réelle d’une disposition du C.s.r. L’infraction est somme toute anodine. Bien que la défense de minimis doit être appliquée avec prudence, le Tribunal est convaincu que la justice ne serait pas bien servie si, dans ces circonstances, le défendeur devait être reconnu coupable. Il s’agit d’une irrégularité insignifiante commise durant un instant et non d’une transgression volontaire et manifeste de la loi. En d’autres termes, le geste reproché est « tellement minime qu’il ne peut à lui seul justifier une déclaration de culpabilité ».
Le défendeur est accusé d’avoir, à titre de conducteur d’un véhicule routier, fait usage d’un téléphone cellulaire. Le défendeur a accroché son téléphone cellulaire sur sa ceinture de sécurité à la hauteur de sa poitrine et l’a mis sur la fonction « haut-parleur » pour bavarder. Il mentionne qu’il installe son téléphone de cette façon puisqu’il sait qu’il n’a pas le droit de l’avoir dans les mains. Est-ce que l’installation du défendeur est un « dispositif mains libres »?
Après avoir fait une revue des définitions de l’expression « dispositif », le Tribunal constate qu’il s’agit d’un mécanisme, soit dans la manière dont les pièces sont agencées, soit en référence aux organes d’un appareil, soit en lien avec un ensemble de pièces. Dans toutes les définitions recensées, les explications se rapportent toutes à un mécanisme et des pièces. Quant à l’expression « mains libres », elle signifie avoir toute latitude, toute liberté d’agir.
Le Tribunal conclut que l’installation que fait le défendeur de son téléphone cellulaire, en l’accrochant après sa ceinture de sécurité et en parlant dans le haut-parleur, ne correspond pas à un dispositif mains libres. L’intention du législateur est de s’assurer de bannir l’usage du téléphone cellulaire, ainsi que de tout autre appareil conçu pour recevoir ou transmettre de l’information, sous réserve des exceptions prévues par la loi (dont le dispositif mains libres). Cette interdiction s’applique au conducteur du véhicule automobile.
Une semaine avant l’expiration du délai d’inscription, l’avocat des demandeurs transmet par courriel au défendeur une proposition de protocole de l’instance en lui demandant de compléter le document, de le signer et de lui retourner. Il transmet aussi par courriel au défendeur, une demande d’inscription pour instruction et jugement qu’il avait complété en ce qui concerne les demandeurs. Dans ce courriel, l’avocat lui explique que ce document est nécessaire pour obtenir une date d’audition et lui demande de fournir les informations permettant de le finaliser. Il l’avise aussi de sa volonté de déposer ce document et le protocole de l’instance au dossier de la Cour. Il appert que le défendeur n’a donné suite à aucun de ces courriels. La proposition de protocole et la demande d’inscription sont déposées au greffe par les demandeurs, sans avoir été complétées et signées par le défendeur. L’avocat du défendeur prétend que le dossier a été irrégulièrement inscrit puisque la demande d’inscription déposée par l’avocat des demandeurs n’a pas été notifiée au défendeur.
En fournissant une adresse courriel dans sa réponse, le défendeur a implicitement accepté que cette adresse puisse être utilisée pour la notification de procédures par les demandeurs, lorsque la notification par un moyen technologique est permise. Cependant, aucun bordereau d’envoi de la demande d’inscription n’a été déposé au dossier. Le courriel joint à cette demande d’inscription laisse clairement entendre que l’avocat des demandeurs n’entendait pas notifier formellement ce document au défendeur, mais qu’il le lui transmettait plutôt pour qu’il le complète. Il n’y a donc pas eu de notification de ce document. Mais compte tenu des circonstances, le Tribunal considère que cette absence de notification n’entache pas d’irrégularité la demande d’inscription déposée par les demandeurs. Ceux-ci ont agi en toute transparence. Ils ont pris l’initiative de transmettre un projet au défendeur. Tout comme pour la proposition de protocole, le défendeur n’y a pas donné suite, contrairement à son obligation de coopération, et n’a donné aucune explication valable pour ne pas avoir complété la demande d’inscription. Le document déposé par les demandeurs est le même que celui qui avait été préalablement transmis au défendeur.
Le Tribunal considère qu’il n’y a pas de désistement réputé de la demande introductive d’instance. Une demande d’inscription a été déposée à l’intérieur du délai et cette demande d’inscription avait préalablement été portée à la connaissance du défendeur, ce qui est l’objectif recherché par une notification. Il n’y a pas lieu de sanctionner par un désistement réputé le défaut de se conformer à une formalité procédurale qui n’aurait procuré au défendeur aucun bénéficie additionnel.
Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MTESS) prétend que le requérant (Monsieur) cohabite avec une conjointe (mise en cause) et leur a réclamé le remboursement des prestations de la sécurité du revenu. Le requérant et la mise en cause s’opposent à la réclamation au motif qu’ils ne sont que des amis qui cohabitent et s’entraident à ce titre, et non pas comme le feraient des conjoints. Monsieur s’oppose au dépôt des publications Facebook au motif que ce serait une incursion dans sa vie privée.
Le Tribunal rejette l’objection car les procédures menant à une décision prise notamment par le Tribunal administratif du Québec (TAQ) doivent être conduites, de manière à permettre un débat loyal, dans le respect du devoir d’agir de façon impartiale. En l’espèce, les documents visés par l’objection n’ont pas été obtenus dans des conditions qui portent atteinte aux droits et libertés fondamentaux des parties. Leur utilisation éventuelle n’est pas non plus susceptible de déconsidérer l’administration de la justice. Il apparaît que c'est plutôt le refus de permettre la communication de ces documents, voire leur production éventuelle, qui aurait cet effet.
La décision de ne pas considérer ou de rejeter les publications Facebook, sans en avoir apprécié la teneur, l’admissibilité ou la valeur probante, empêcherait les parties d’administrer valablement leur preuve et de réfuter, le cas échéant, leurs positions respectives. Le Tribunal doit rendre la décision la plus éclairée possible au regard des faits qui lui sont soumis dans chaque cas. Il doit apprécier les témoignages et les documents à la lumière de toute la preuve qui lui est présentée et suivant l'esprit des lois sociales qu’il administre. Sans restreindre le moins du monde ces prémisses, il doit toujours permettre, comme la loi le prescrit, un débat loyal et impartial dans le cadre duquel les parties auront l'occasion de mettre sur la table tous les faits au soutien de leurs prétentions, et d'en débattre. La communication franche et complète, tant à l’audience qu’au préalable, est la règle obligée.
Les preuves visées par l’objection ont été obtenues de façon légale, sans accroc aux droits et libertés fondamentaux des parties et il n’y a rien qui soit ici de nature à déconsidérer l’administration de la justice. Les règles qui gouvernent le régime de la preuve quasi-judiciaire ne sont pas aussi contraignantes que celles qui régissent la preuve en matière civile ou pénale. Elles sont marquées au coin de cette saine flexibilité qu’exigent la liberté et la recherche de la vérité.
Il est légitime pour le Tribunal de vouloir connaître ces informations disponibles et importantes, et de pouvoir questionner ce qui y est mentionné. Les documents visés par l’objection formulée deviennent donc des éléments importants du litige principal et le Tribunal doit sans aucun doute s'y intéresser lui aussi.
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