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NOUVELLES

  • 12 Dec 2022 9:37 AM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Le Tribunal est appelé, entre autres, à décider de la recevabilité d’une version PDF d’une résolution sur une clé USB. La version PDF provient du transfert, sur support technologique, d’un document papier et son passage d’une technologie à une autre doit être documenté pour avoir une valeur juridique.  Le Tribunal constate que l’on ignore qui a procédé au transfert, par quelle procédure et à partir de quel document. La preuve démontre cependant qu’il ne s’agit pas d’une numérisation de l’original. Le Tribunal doit présumer que la technologie utilisée, pour la création de la version PDF de la résolution, permet d’en assurer l’intégrité. Cependant, la présomption ne vise que la fiabilité de la technologie et non l’intégrité du document.  Le Tribunal ignore qui est l’auteur du document, le type de matériel utilisé ainsi que les étapes suivies pour le transfert de l’original sur ce support. En l’absence de métadonnées ou de documentation concernant l’authenticité du document, son intégrité ou son mode de transfert, il ne peut l’admettre en preuve.

    Église Essénienne Chrétienne c. Cecchella, 2022 QCCS 3295 (CanLII), <https://canlii.ca/t/jrstk>, 7 septembre 2022.

  • 12 Dec 2022 9:37 AM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Dans une affaire concernant un recours hors délai à la suite de la notification d'une décision par courriel, le Tribunal estime que monsieur a été valablement notifié dès le 27 avril 2021. Le courriel est un mode de transmission valide. On parle alors de notification par un moyen technologique. C’est la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information (LCCJTI) qui établit les règles applicables aux communications effectuées au moyen de documents technologiques, dont le courriel.  Le Tribunal est d’avis qu’une « décision » est un document au sens de l’application de l’article 71 de la LCCJTI. Cette disposition établit que la notion de document prévue par la LCCJTI s’applique à l’ensemble des documents visés dans des textes législatifs. Il est vrai que le terme « décision » n’apparait pas dans la liste de l’article 71, mais l’utilisation du mot « notamment » juste avant l’énumération de divers termes indique bien qu’il n’en est pas exclu pour autant. La notification d'une décision par courriel s'établit par l'application d'une présomption relative au moment de la réception du courriel (art. 31 LCCJTI). Par conséquent, le requérant avait connaissance de la décision dès le 26 avril 2021 et celle-ci lui a été valablement notifiée le lendemain. La fiche de correspondance du système OSCAR fait office de bordereau d'envoi.

     L.C. c Québec (Travail, Emploi et Solidarité sociale),2022 CanLII 72998 (QC TAQ), <https://canlii.ca/t/jrf7h>, 18 juillet 2022.

  • 12 Dec 2022 9:36 AM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Cabanons Fontaine et Cabanons Mirabel sont deux entreprises concurrentes qui oeuvrent dans le commerce des cabanons. Cabanons Fontaine a enregistré plusieurs noms de domaine, dont «cabanonmirabel.com», «cabanonsmirabel.ca» et «garagescabanonsmirabel.com», redirigeant les consommateurs vers son site Internet principal. L'intimée, Cabanons Mirabel, a alors introduit un recours en commercialisation trompeuse et la juge de première instance a conclu à la présence de commercialisation trompeuse en lien avec l'enregistrement, par l’appelante Cabanons Fontaine, de noms de domaine presque identiques à la marque de l'intimée, que celle-ci a ensuite utilisés pour rediriger les consommateurs vers son site Internet principal.  L’entreprise Cabanons Fontaine fait appel de ce jugement en  soutenant qu’elle n’a pas voulu tromper les consommateurs. Elle a acquis les trois noms de domaine en litige comme stratégie de Web Marketing à des fins d’obtenir le plus grand nombre de référencements naturels sur les moteurs de recherche et d’optimiser son positionnement dans les résultats de recherche, le tout suivant une stratégie d’optimisation pour les moteurs de recherche.

    La Cour d’appel rappelle qu’en de telles matières, l’intention de l’appelante importe peu. Une représentation trompeuse peut être délibérée ou peut découler de la négligence ou de l’insouciance. L’enregistrement de noms de domaine pratiquement identiques à la marque CABANONS MIRABEL que l’appelante connaissait, en omettant d’inclure le nom « Fontaine » et sans faire aucune vérification du risque de confusion ou d’illégalité, est au minimum négligent ou insouciant et la confusion du public en était une conséquence probable. Cela suffit pour conclure à la tromperie.

    L’appelante soutient aussi que sa stratégie d’optimisation (Search Engine Optimization) visait à favoriser son positionnement dans la liste de résultats de recherche d’un moteur de recherche et ne crée pas de confusion dans l’esprit du public. Elle fait valoir que l’utilisation des noms de domaine dans un tel contexte est invisible et que les consommateurs ne feront donc aucun lien entre l’appelante et ces noms de domaine. 

    Il est vrai que si le consommateur entre les mots « Cabanons Mirabel » dans la barre de recherche d’un navigateur Web tel que Google Chrome, le moteur de recherche utilise les mots inscrits comme mots-clés pour rechercher les sites les plus pertinents et il génère une liste de résultats en ordre de pertinence selon un algorithme lui étant propre. Le consommateur choisit dans la liste de résultats le site auquel il veut accéder. En l’espèce, la preuve démontre qu’une recherche pour « Cabanons Mirabel » sur Google donne le site Internet de l’intimée en première place et le site de Cabanons Fontaine en troisième place. 

    Le fait que l’appelante a enregistré les noms de domaine en litige pourrait avoir eu pour seul effet dans ce scénario d’améliorer le positionnement de Cabanons Fontaine dans cette liste. Ceci ne pose aucun problème de commercialisation trompeuse. Par contre, la juge de première instance a estimé que « les internautes ont développé l’habitude de chercher le site Web correspondant à une entreprise qu’ils connaissent en inscrivant la marque de commerce de cette entreprise dans le fureteur du navigateur internet ». Un consommateur peut atteindre le site Internet d’une entreprise en entrant le nom de domaine ou le nom commercial ou la marque de commerce de l’entreprise recherchée dans la barre d’adresse du navigateur  Si le consommateur entre la bonne adresse, il est dirigé directement sur le site Internet choisi.

    Cela soulève deux sources de confusion. D’abord, si un consommateur tente d’entrer le nom de domaine « cabanonsmirabel.com » dans la barre d’adresse de son navigateur afin de se rendre directement sur le site Web de l’intimée, mais qu’il tape « .ca » ou qu’il oublie le « s », il est d’abord redirigé vers le site « garagescabanonsmirabel.com » et ensuite vers le site principal de Cabanons Fontaine. Si, en cherchant un garage de l’intimée, le consommateur entre le nom « garagescabanonsmirabel.com » dans la barre d’adresse, il est redirigé vers le site principal de Cabanons Fontaine. Dans tous ces cas, le consommateur qui cherche à accéder au site Web de l’intimée se retrouve automatiquement et sans le savoir sur le site de Cabanons Fontaine. De plus, une fois arrivé sur le site de Cabanons Fontaine, le consommateur qui a entré le nom « cabanonmirabel.com » ou « cabanonsmirabel.ca » peut apercevoir le nom « garagescabanonsmirabel.com » dans la barre d’adresse, ce qui suggère un lien entre Garages Cabanons Mirabel et Cabanons Fontaine. La juge pouvait donc arriver à cette conclusion suivant le bon sens et l’expérience humaine et la preuve présentée.

    La preuve démontre que le nom « cabanonmirabel.com », « cabanonsmirabel.ca » ou « garagescabanonsmirabel.com » est visible lors de la redirection. De plus, il demeure la possibilité que, parmi les consommateurs redirigés sur ce site, certains y restent, vu la disponibilité immédiate de produits similaires et qu’ainsi des ventes soient perdues pour l’intimée. Enfin, le consommateur moyen, pressé et ayant un vague souvenir de la marque de commerce l’ayant poussé à faire sa recherche initiale, ne remarque pas qu’il a été redirigé vers le site Web de la mauvaise entreprise. L’appel est rejeté.

    Cabanons Fontaine inc. c. 9036-4316 Québec inc. (Cabanons Mirabel), 2022 QCCA 1243 (CanLII), <https://canlii.ca/t/js03q>, 19 septembre 2022.

  • 12 Dec 2022 9:36 AM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Il est demandé au Tribunal d'ordonner la divulgation du contenu informatique de téléphones cellulaires que l’Autorité des marchés financiers (AMF) a saisis en 2017 dans le cadre d'une perquisition effectuée au lieu d'affaires de l'un des défendeurs et qu'elle détient depuis.  Les représentantes de l’AMF prétendent, pour ne pas divulguer le contenu des appareils cellulaires, que la technologie dont disposaient les enquêteurs au moment de la saisie n’a pas réussi à briser les mots de passe de ces appareils et n’a pas permis l’extraction de messages courriel ou Skype. Elles soulignent que c’est pour cette raison que l’ensemble des informations se trouvant dans ces téléphones cellulaires n’a pas été divulgué.

    Certes l’AMF avait l’obligation de divulguer les informations en sa possession qui sont des fruits de l’enquête et le contenu des téléphones saisis dans le cours de l’enquête est un fruit de l’enquête. Toutefois, le Tribunal est d’avis que cette obligation de divulgation ne s’applique pas aux renseignements qui échappent au contrôle de l’AMF.

    Un mot de passe est appliqué sur un appareil électronique pour assurer la confidentialité des données qu’il contient. Il s’agit d’une mesure prise par le propriétaire d’un appareil pour en interdire l’accès à celui qui ne possède pas le mot de passe. Ainsi, une personne peut posséder un téléphone sans avoir accès à son contenu. C’était le cas des enquêteurs de l’AMF en 2017. Confrontée aux limites technologiques de l’époque, l’AMF n’avait pas à divulguer ce à quoi elle n’avait pas accès ou qui n’était pas sous son contrôle. Elle ne pouvait pas ni ne devait communiquer le contenu des messages courriel ou Skype auxquels elle n’avait pas accès.

    Cependant, l’obligation de divulgation est continue. Les preuves à l’effet que la technologie actuelle permettrait possiblement d’extraire le contenu ou une partie du contenu des téléphones cellulaires obligent l’AMF à réévaluer les renseignements en sa possession. Les téléphones cellulaires sont toujours en possession de l’AMF. S’il s’avère que la technologie dont dispose le Laboratoire d’informatique judiciaire permet maintenant l’accès aux appareils, l’AMF devra se conformer à ses obligations de divulgation.

    Lacroix c. Autorité des marchés financiers, 2022 QCCQ 1884 (CanLII), <https://canlii.ca/t/jntq0>, 20 avril 2022.

  • 8 Nov 2022 5:14 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Nous avons eu une merveilleuse participation à la conférence d'automne 2022 de CAN-TECH Law, les 2 et 3 novembre 2022, à l'hôtel Sheraton Centre Toronto.

    Cliquez ici pour les points saillants :

    https://cantechlaw.wildapricot.org/2022cantechlawfallconferencehightlights


  • 16 Sep 2022 5:34 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Dans le cadre d’une contestation de la décision en révision de Retraite Québec, refusant de lui verser la rente de conjoint survivant à la suite du décès du cotisant, la requérante prétend qu’elle a droit à la rente puisque malgré le fait qu’en août 2017, elle a annoncé à monsieur la fin de leur relation, ils ont continué à cohabiter et à partager le même lit. Elle indique qu’ils sont en couple depuis trente années et que la séparation annoncée n’était pas définitive. En début d’audience, la requérante dépose en preuve des captures d’écran d’échanges de SMS (texto) entre elle et le cotisant. Retraite Québec soutient que la preuve est incomplète puisque plusieurs messages ont été supprimés; la requérante explique que les seuls messages supprimés sont des émoticônes.

    Le Tribunal est d’avis que la photocopie d’une capture d’écran d’un message SMS est un élément matériel tout comme une photocopie ou un duplicata et doit suivre les règles de preuve sous l’article 2855 du Code Civil.  Le contenu d’un message, qu’il soit écrit ou par émoticône fait partie intégrante du texte et est porteur d’information. Le Tribunal a également constaté l’absence de plusieurs messages. Par conséquent, la requérante doit offrir une preuve distincte pour établir l’authenticité telle que définie par de nombreuses décisions. Elle n’a pas offert cette preuve distincte. Bien au contraire, de son propre aveu, elle admet avoir supprimé certains messages. La fiabilité de la pièce ne passe pas le test d’authenticité, elle est « douteuse » puisqu’incomplète et est inadmissible en preuve.

    S.B. c Retraite Québec, 2022 CanLII 9645 (QC TAQ), 3 février 2022, <https://canlii.ca/t/jmftm

  • 16 Sep 2022 5:34 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Lors d’un moment de pause au cours de l’audience tenue par voie virtuelle, l’employeur a laissé son micro ouvert et une conversation entre le directeur de l’entreprise et son représentant a été enregistrée par le travailleur. Le travailleur demande maintenant que cet enregistrement soit mis en preuve.  Le travailleur prétend qu’à l’occasion de cette pause à micro ouvert, les deux interlocuteurs de l’employeur ont comploté pour commettre un parjure, sinon de modifier les faits concernant une certaine attestation médicale. L’employeur s’objecte à la production de cet enregistrement, prétendant qu’il s’agit d’une conversation privée et que la recevabilité de celle-ci en preuve violerait ses droits.

    Le Tribunal permet la production de l’enregistrement en question. Non seulement, il n’y a pas en l’espèce de violation du secret professionnel mais le fait que l’employeur ait « accidentellement » laissé son micro ouvert à l’occasion d’une procédure dont le caractère est à l’origine public, ne lui confère pas une exception automatique au caractère public de la conversation. L’expectative de vie privée dans un palais de justice ou dans une salle virtuelle, dont le caractère est d’emblée public, n’est pas la même que celle qu’aurait l’employeur dans ses locaux privés. La distinction entre l’endroit d’où il opère et du fait qu’il opère sur un réseau public virtuel est importante. L’employeur ne pouvait ignorer que la plateforme virtuelle était active ou risquait potentiellement de l’être. Si bien qu’il s’agisse d’une erreur de sa part, le Tribunal ne peut ignorer le caractère répréhensible de l’acte visé.

    Dans les cas où une conduite répréhensible est planifiée et que l’information de cette planification est disponible, le rejet de la preuve déconsidèrerait davantage la saine administration de la justice que son admission, encore une fois, devant cet objectif de la recherche de la vérité.

    Bédard et Office des producteurs de bois de la Gatineau, 2022 QCTAT 1549 (CanLII), 1er avril 2022, <https://canlii.ca/t/jnkn6>

  • 16 Sep 2022 5:33 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Il s’agit d’une réclamation pour travaux de sous-traitance non payés. Au soutien de sa demande, Direct Contrôle communique en preuve des appels de services (bons de travail) qui sont liés aux factures dont il réclame le paiement.  La défenderesse s’objecte à la production en preuve de ces appels de services se présentant sous la forme d’écrits dont le support fait appel aux technologies de l’information. Elle soutient que pour faire la preuve de l’intégrité de leur contenu, il appartenait à Direct Contrôle de mettre en preuve leurs métadonnées et de faire appel à un expert informaticien pour attester de l’intégrité des informations qu’ils contiennent.

    Le Tribunal retient qu’à la différence de l’élément matériel de preuve qui doit faire l’objet d’une preuve distincte en établissant l’authenticité, l’acte sous seing privé ne nécessite pas une telle preuve à moins que la partie à qui on l’oppose ne le dénie ou ne reconnaisse pas son origine ou qu’elle conteste l’information qu’il porte de la façon énoncée à l’article 262 du Code de procédure civile. Le fait qu’il s’agisse d’un document sur un support technologique n’y change rien. Or au procès, la défenderesse n’a administré aucune preuve contestant les informations sur les appels de services. Ainsi, Direct Contrôle n’avait pas à déposer les métadonnées et encore moins un rapport d’expert d’informaticien pour les introduire en preuve.

    Direct Contrôle inc. c. RGF Électrique inc., 2022 QCCS 1762 (CanLII), 17 mai 2022, <https://canlii.ca/t/jp94h>

  • 16 Sep 2022 5:33 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Dans le contexte d’un recours pour atteinte à la réputation, le demandeur désire introduire en preuve des extraits d’enregistrements audio qu’il a réalisé alors que la défenderesse, son épouse, est seule à l’appartement. Il dépose une clé USB contenant quatre fichiers numériques, soit trois extraits et un enregistrement intégral de conversations téléphoniques de la défenderesse. Puisque les conversations qui y sont captées se déroulent en Wolof et en Zarma, deux dialectes sénégalais, la clé USB est accompagnée de traductions réalisées par une traductrice agréée.  La défenderesse s’objecte au dépôt de ces éléments de preuve, au motif qu’ils sont obtenus en violation d’un de ses droits fondamentaux soit son droit à la vie privée, et que leur dépôt en preuve déconsidérerait l’administration de la justice. Le Tribunal maintient l’objection.

    L’enregistrement d’une conversation privée pour fin d’établissement d’une preuve est une atteinte à la vie privée lorsque la personne enregistrée est seule dans sa demeure. Selon l’article 2858 C.c.Q., il faut déterminer si son dépôt en preuve est de nature à déconsidérer l’administration de la justice. Le fardeau de démontrer que l’utilisation des enregistrements déconsidère l’administration de la justice repose sur les épaules de la partie qui s’objecte.

    L’article 2858 C.c.Q introduit une règle d'exclusion de preuve qui protège une valeur supérieure : l’intégrité du système de justice civile. L’exercice requis du Tribunal en est un de maintien de l’équilibre entre deux valeurs, soit le respect d’un droit fondamental d’une part et la recherche de la vérité d’autre part. Les tribunaux peuvent ainsi permettre une preuve qui, même si elle est obtenue en violation d’un droit fondamental, ne déconsidère pas l’administration de la justice, en ce sens qu’elle permet de connaître la vérité. Il en est ainsi si le droit d’action d’une partie se trouve compromis si la preuve illégalement obtenue n’est pas permise.

    Un des critères pour décider si l’utilisation d’une preuve déconsidère l’administration de la justice est la gravité de la violation.  La question qu’il faut se poser est : « La gravité de la violation aux droits fondamentaux, tant en raison de sa nature, de son objet, de la motivation et de l'intérêt juridique de l'auteur de la contravention que des modalités de sa réalisation, est-elle telle qu'il serait inacceptable qu'une cour de justice autorise la partie qui l'a obtenue de s'en servir pour faire valoir ses intérêts privés » ? Si le juge se convainc que la preuve obtenue en contravention des droits fondamentaux constitue un abus du système de justice parce que sans justification juridique véritable et suffisante, il doit la rejeter.

    En perçant la bulle d’intimité de la défenderesse de manière délibérée et répétée, le demandeur a commis une intrusion directe dans sa sphère personnelle, sans intérêt juridique réel, afin de mettre à jour des causes de reproche qu’il ignore ou qu’il ne soupçonne pas.  

    Un autre élément important à soupeser pour évaluer la gravité de la violation est la modalité de sa réalisation. Dans la présente affaire, l’intimité de la défenderesse est transpercée dans ses replis les plus profonds, alors qu’elle converse avec des membres de sa famille, durant une période où elle a besoin de se confier sur ses problèmes. Le degré d’intimité auquel elle est en droit de s’attendre est alors très élevé.  La situation doit être distinguée de celle où un employeur surveille un employé dans le but de confirmer un manquement à son obligation de loyauté ou à une autre obligation. De même, le cas où une partie soupçonne son ex-employeur de tenir des propos dénigrants à son sujet est différent du cas actuel. Enfin, le présent cas n’en est pas un où la personne enregistrée peut être observée par le public en général.

    De plus, la preuve que le demandeur veut administrer peut être faite autrement. En déposant les enregistrements, le demandeur cherche à démontrer que les accusations portées par la défenderesse ne reposent sur aucun motif raisonnable et sont abusives. Nul besoin des enregistrements des conversations pour démontrer cet élément.  Aussi, la preuve obtenue en violation des droits fondamentaux de la défenderesse ne vient pas en confirmer une autre déjà existante au moment où elle est confectionnée.

    Par conséquent, le dépôt en preuve des enregistrements réalisés par le demandeur en violation des droits de la défenderesse déconsidérerait l’administration de la justice dans l'esprit d'une personne raisonnable, objective et bien informée.

    En plus, trois des enregistrements déposés sont des extraits des conversations que le demandeur juge pertinents.  Il est impossible de déterminer si les conversations sont complètes. Le Tribunal n’est donc pas en mesure de vérifier la prétention de la défenderesse qui plaide que ces extraits sont présentés hors contexte. 

    Mais il y a encore plus. Le demandeur a réalisé les enregistrements avec un téléphone cellulaire. Ce sont des enregistrements numériques, des documents technologiques tels que l’article 2855 C.c.Q. l’entend. Il explique qu’il a transféré d’abord les fichiers audio de son téléphone cellulaire à son ordinateur. Aucune preuve documentaire ne révèle le type de fichier sur lequel les conversations sont originalement captées. Par la suite, il a utilisé un logiciel pour localiser et extraire des segments des enregistrements ; il était alors en compagnie de deux amis qui ont eu l’occasion d’entendre les enregistrements ainsi captés. Le demandeur a transmis ensuite les enregistrements par courriel à une traductrice, en y joignant un projet de traduction qu’il lui demande de valider et en lui précisant que le son d’un des enregistrements n’est pas bon.

    Le Tribunal conclut que cette façon de procéder ne permet pas d’assurer l’intégrité des documents technologiques. Il est impossible de l’affirmer, ni de la nier. Plusieurs manipulations sont effectuées par le demandeur. Non seulement des transferts, mais aussi des coupes. Les conversations qu’il veut mettre en preuve sont incomplètes.  En raison de ces nombreuses manipulations, on ne peut affirmer que l’intégrité des fichiers est assurée. Ils sont alors soumis à une preuve distincte d’authenticité. Aucune telle preuve n’est administrée. Aucune métadonnée n’est déposée démontrant la date réelle ou l’heure de création des fichiers, ni le nombre de transferts qui sont effectués (ou leur date) avant qu’ils soient déposés.

    En somme, non seulement les enregistrements sont-ils réalisés en violation des droits fondamentaux de la défenderesse mais au surplus, ils sont parcellaires, les conversations sont incomplètes et les fichiers numériques qui les supportent sont manipulés à plusieurs reprises. Leur intégrité est loin d’être démontrée. Leur dépôt est de nature à nuire à l’équité du procès et à déconsidérer l’administration de la justice dans l’esprit d’une personne raisonnable, objective et bien informée.

    M.K. c. A.F., 2022 QCCQ 4060 (CanLII), 23 juin 2022, <https://canlii.ca/t/jqgdv>

  • 16 Sep 2022 5:32 PM | CAN-TECH Law (Administrator)

    Il s’agit d’une requête en annulation de désistement. Le requérant demande la réouverture de ses dossiers. Il précise entre autres que « de toute façon je n’ai pas signé au stylo le désistement envoyé par courriel ». Il laisse sous-entendre que ses désistements sont invalides en raison de l’absence de sa signature « au stylo ».

    L’article 8 des Règles de preuve et de procédure du Tribunal administratif du travail (RPPTAT) ne requiert pas que le désistement soit signé de la main de son auteur, mais il doit être identifiable.  Le requérant reconnait à plus d’une reprise avoir rédigé ses désistements, lesquels sont transmis via son adresse courriel qui est connue du Tribunal. Il en assure également le suivi. Devant cela, il ne fait aucun doute qu’il en est l’auteur.  De plus, l’inscription d’un nom au bas d’un courriel peut constituer une signature électronique . Aussi, l’article 39 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information spécifie que quel que soit le support du document, la signature d’une personne peut servir à l’établissement d’un lien entre elle et un document.  La signature peut être apposée au document au moyen de tout procédé qui permet de satisfaire aux exigences de l’article 2827 du Code civil.

    Par conséquent, les désistements du requérant ne peuvent être annulés pour le motif qu’ils n’ont pas été signés « au stylo », les exigences de l’article 8 RPPTAT étant pleinement rencontrées.

    Antoon c. Momentum Technologies inc., 2022 QCTAT 1058 (CanLII), 7 mars 2022, <https://canlii.ca/t/jn1s4>

  

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